OUI au partenariat enregistré: la mobilisation s’organise

OUI au partenariat enregistré: la mobilisation s’organise

Suite à l’aboutissement du référendum lancé par l’Union Démocratique Fédérale (petit parti de droite), les associations homosexuelles se mobilisent en vue de la votation populaire du 5 juin 2005. Nous nous sommes entretenus avec Christian Verdon, porte-parole du comité de la coordination nationale «Oui au partenariat enregistré».

Comment se coordonne la mobilisation des gays et des lesbiennes depuis le lancement de la campagne référendaire?

Les quatre associations nationales, Pink Cross (organe faîtier des associations gaies suisses), LOS (Organisation suisse des lesbiennes), Network (Cadres gays) et FELS (Associations de parents et ami-e-s) avaient anticipé l’aboutissement du référendum et créé une structure spécifique: la coordination nationale «Oui au partenariat enregistré». Cette plate-forme a pour but de mener la campagne, de trouver son financement, d’élaborer les contenus et matériels, et de créer des structures de proximité en lien avec les associations cantonales. Huit groupements ont été créés, dont un seul pour la Suisse romande. Il est le fruit des Gay Pride qui se sont déroulées dans toutes les capitales romandes, renforçant les liens entre les différentes régions, mais aussi de la synergie issue des rencontres inter-associatives. La volonté est donc d’instaurer une solidarité intercantonale, car la Romandie est un grand territoire avec des forces mal réparties entre le bassin lémanique et les autres cantons, et de donner une orientation plus spécifique à la campagne. En effet, il y a une différence de sensibilité entre la Suisse romande et la Suisse alémanique sur le partenariat. Par exemple, la thématique de «l’Überfremdung» causée par les «partenariats blancs» est plus souvent agitée Outre-Sarine, alors que l’adoption comme prochaine étape programmée est l’attaque la plus courante en Romandie. A l’inverse, il me semble que la sensibilité germanique est plus ouverte à ce genre de «questions de mœurs» que celle des Romands, à l’instar du partenariat zurichois qui a été adopté à une large majorité par les votant-e-s.

Quels arguments sont privilégiés en faveur du partenariat?

Au niveau national, nous voulons porter le message que le partenariat est un cadre juridique pour un projet de vie commun de deux êtres qui s’aiment, et qui en ont besoin pour pouvoir s’épanouir en tant qu’êtres humains. Nous ne revendiquons pas le mariage, mais nous demandons à pouvoir bénéficier de même droits qu’un couple marié; des droits aussi évidents que le droit de visite à l’hôpital ou en matière de baux à loyer. Du fait de l’avancée des droits des gays et des lesbiennes dans les pays avoisinants, beaucoup croient qu’il n’y a pas de problème de ce type en Suisse et, comme le disent nos adversaires, que des arrangements ponctuels par des contrats privés permettent de les résoudre. Dans le droit suisse actuel, un couple homosexuel est considéré comme étranger l’un pour l’autre et, dans l’adversité, le conjoint devient dépendant du bon vouloir de sa «belle-famille». Du point de vue du contenu, le partenariat est un paquet de droits et de devoirs allant dans le sens d’un engagement mutuel, proche de celui du mariage entre un homme et une femme – le mariage étant un modèle «évident» dans nos sociétés judéo-chrétiennes. Il en diffère nettement par l’absence de cérémonie civile, par le fait que chacun des partenaires conserve son nom de famille, par l’absence de naturalisation facilitée, et par l’interdiction de l’adoption et de la procréation médicalement assistée. Mais, surtout, le partenariat est exclusivement réservé aux unions homosexuelles, et ne fait pas concurrence au mariage.

Quels sont les enjeux symboliques du partenariat enregistré?

Cela soulève la question de fond de l’égalité des citoyen-nes: est-ce qu’un-e homosexuel-le vaut la même chose qu’un-e hétérosexuel-le? Il s’agit d’une situation inédite, car aucun des pays limitrophes n’a connu de référendum populaire sur une telle question. Dans une stratégie de dénigrement, les opposant-e-s postulent une sorte de mécanisme implacable entre l’obtention du partenariat enregistré et celle du mariage. Cela revient à faire injure aux citoyen-ne-s de ce pays puisque, à travers le référendum, le peuple a le dernier mot sur les lois votées par le Parlement. Selon ces mêmes adversaires, l’instauration du partenariat coûterait trop cher à l’Etat, mais ils omettent que la charge fiscale est plus élevée pour les familles, générant ainsi des recettes supplémentaires et déchargeant l’Etat du devoir d’assistance. Cette loi concerne certes une minorité puisque la plupart des études, depuis les années 1950, estiment entre 5 à 10% le nombre d’homosexuel-les dans la population. Veut-on dire à environ 500000 personnes qu’elles doivent demeurer des citoyen-nes de seconde zone?

Quelle dénomination adopter, PACS ou PEPS?

Le partenariat suisse se nomme le PEPS, pour «partenariat enregistré entre personnes de même sexe». C’est important de souligner sa différence avec le PACS français du fait qu’il s’adresse exclusivement aux couples gays et lesbiens. L’entrée en vigueur du PACS français a sans nulle doute participé à la meilleure acceptation de l’homosexualité en Suisse romande, en raison de l’influence notable des médias français. Pour preuve, nous avons été invités sur le plateau de l’émission de la TSR «Infrarouge», 2-3 jours après la publication d’un manifeste en faveur de l’homoparentalité dans «Le Nouvel Observateur» en novembre 2004. Les médias français, les Gay Pride et le travail des associations ont contribué à une meilleure visibilité de l’homosexualité et à une évolution des mentalités. Nous nous trouvons donc dans une situation où le débat risque d’être encouragé par ce qui se passe dans les pays limitrophes, mais confronté-e-s à un vide juridique en Suisse.

Entretien réalisé par Thierry DELESSERT

Lien à consulter: http://www.partenariat-oui.ch/